Le corps des murs

Le corps des murs

Les murs sont pour moi la matérialisation d’un corps sensible en permanente appréhension.

Ils constituent une double peau, une présence physique, une mémoire.

J’ai toujours été attirée par leurs lignes, leurs aspérités, leurs écailles et sinuosités, leurs sillons et traces, leurs failles et blessures. Je suis touchée par les empreintes du temps qu’ils recèlent.

Leurs souvenirs tangibles et leurs murmures m’interpellent aussi.

Je ne sais si je leur offre un autre regard photographique ou s’ils me révèlent leur regard intime que je traduis en image. L’esthétisme consiste en un double mouvement réciproque ininterrompu.

Mes séries : « Un autre regard » et « Abstraction attraction » sont en cela intimement liées même si les photographies ne sont pas totalement coexistantes : l’une s’attache à saisir le passage du temps, l’autre à peindre l’abstraction féconde. 

Révéler ce qui n’est plus ou magnifier ce qui demeure ET laisser place à l’imagination que permet l’abstraction.

La matière (qu’elle soit murale, ou terreuse, végétale, minérale) m’ancre dans la réalité et en même temps m’en extrait, m’en dissout, en m’entraînant vers des pensées insaisissables libérant l’imaginaire.

Le passé devient à la fois réalité et présent. 

La frontière entre absence et présence est re-visitée.

La matière est ainsi puissamment physique et indéniablement mentale. 

Elle est ressentie et imaginée, réelle et réinventée.

Elle est peau et pensée à la fois.

Elle est corps et cri.

Elle me touche autant que je la touche, elle me parle.

J’essaie d’en restituer ici le langage.

© Textes et photographies: Lorraine Thiria/All rights reserved

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